jeudi 1 mai 2014

Cinquième mois.


Aujourd'hui le premier jour de mai. Le temps est loin déjà où mon père se "quimpait" (entendez, se faisait beau et propre, s'habillait comme pour un dimanche) pour aller manifester. Marcher dans les rues du Pays-noir et revendiquer haut et fort son statut d'ouvrier. Revendiquer le droit à un salaire décent, à des congés payés au milieu de l'été et à cette forme de respect que l'histoire lui donnait à peine le droit d'espérer. Mon père se nouait autour du cou un foulard rouge, signe de toutes les revendications des plus secrètes aux plus nécessaires. J'avoue que j'étais fière de voir et de ressentir l'importance que revêtait cette fête, souvent une journée baignée par le soleil, pour le travailleur honnête mais socialement maladroit et bourru qu'était ce tuyauteur, chef d'équipe dont "les hommes" partageaient les joies simples et les passe-temps ludiques.
Ma mère était fière du sien d'homme et il battait le pavé beau et paradeur comme un coq avant de se laisser gagner par les senteurs de l'alcool des bières blondes. Cette journée ne pouvait être réussie que si la fille de Nestor et Dorothée était, elle aussi, vêtue d'une d'une jupe, d'un chemisier et d'une veste d'une élégance originale, ouvragés pendant des semaines en prévision du premier jour du mois des mariages. J'ai toujours adoré l'odeur des savons frais, des parfums d'époque et les bijoux qui, déjà de pacotille alors, donnait un sens à la séduction. Il n'y a plus que quelques récupérations politiques dans les manifestations rares et discrètes des "premier mai" de ce siècle. Dommage. Je ne suis pas encore véritablement rentrée dans la continuité de ce blog. Je reviens doucement aux affaires mais je passe surtout beaucoup de temps dehors. Un quinzaine de jours à patienter encore avant les saints de glace et l'aventure des semis et des plantations pourra réellement recommencer. Les bandes de terres qui entourent la pelouse ont été retournées et les carrés vont ingurgiter terre, amendements et terreaux dans les jours qui viennent.
J'ai fait, ces derniers jours en cuisine, la part belle aux salades en tous genres. Pas de quoi se glorifier du travail mais être heureuse souvent des résultats inattendus que le mélange des saveurs, des couleurs et des genres (fruits légumes, viandes) libère dans l'assiette. Les derniers jours, des épinards et du poulet, des oeufs cuits mollets et des pommes de terre rissolées. Ce curieux couscous de morceaux de boeuf, carottes et courgettes qui, sans être de la-bas, n'est pas tout à fait comme ici. Bref de belles découvertes qui glissent sur le palais. Dans quelques minutes, je crumbelise… Des fraises, de la rhubarbe du bout du jardin déjà très présente mais aussi quelques boules de glace au coco et à la poire… Nous glissons vers l'été… D'ailleurs, le papy a laissé le premier vin frais se reposer dans le froid léger de la porte du frigo… Un premier signe tangible que, c'est certain, nous glissons vers l'été.